Benjamin Ambrosio – Enseignant-chercheur en mathématiques et membre du LMAH

Benjamin Ambrosio, maître de conférences et chercheur au sein du Laboratoire de Mathématiques Appliquées du Havre (LMAH), est aussi chercheur visitant au Courant Institute of Mathematical Sciences de l’université de New York, il évoque son parcours et l’enjeu de ses recherches à l’international.

Pouvez-vous nous parler de vous et de votre parcours ?

Titulaire d’une licence de l’Université Paris Dauphine et d’un Master de Sorbonne Universités (Paris 6), j’ai effectué une thèse de Doctorat au laboratoire Jacques-Louis Lions, Sorbonne Universités (Paris 6), que j’ai obtenu en 2009. Dans ma thèse intitulée “Propagation d’ondes dans un milieu excitable: simulations numériques et approche analytique”, j’ai procédé à une analyse mathématique qualitative et numérique de certaines solutions d’équations différentielles et aux dérivées partielles inspirées des neurosciences.
Après un postdoctorat de dix mois a l’INRIA, j’ai été recruté en tant que maître de conférences à l’Université Le Havre Normandie en 2010. Je suis titulaire de l’HDR (Habilitation à diriger des recherches) depuis 2021.

Parlez-nous de l’objet de vos recherches ?

Mes recherches portent sur l’analyse qualitative mathématique et numérique de systèmes dynamiques motivés principalement par des applications en neurosciences. Cela rentre dans la thématique fédératrice du labo de mathématiques qui est celle des systèmes complexes. De l’échelle de l’entité neuronale, jusqu’à l’échelle macroscopique, les phénomènes observés dans le cerveau suscitent de nombreuses questions pour la communauté scientifique. Je pense ici par exemple à l’émergence de rythmes, de synchronisation, aux ondes, aux phénomènes non linéaires spatio-temporels à différentes échelles. Les systèmes dynamiques, les réseaux, les EDO, les EDP déterministes et stochastiques foisonnent dans cette thématique. Les mathématiques offrent une représentation permettant d’aider à la compréhension des mécanismes produisant ces phénomènes. D’un autre côté, ces problématiques suscitent de nouveaux développements mathématiques. Il s’agit d’un cercle vertueux. Une reconnaissance intéressante pour la communauté est le récent prix Gruber. Ce prix décerné par l’Université de Yale (500 000 dollars) récompense des recherches ayant abouti à des avancées remarquables en neuroscience. En 2022, il a été attribué à des chercheurs travaillant sur des modèles mathématiques en neuroscience, qui, je cite “ont permis une avancée remarquable dans la compréhension de l’esprit et du cerveau”.

Vous organisez de nombreux séminaires, quels en sont les enjeux ?

Pour avoir une recherche vivante, de pointe et jour des enjeux sociétaux, il est nécessaire de se confronter aux dernières avancées dans le domaine. Lorsqu’un chercheur assiste à un séminaire, il se nourrit d’idées nouvelles, ce qui le fait avancer dans ses recherches. Cela agit en parti par émulations. Les séminaires participent aussi au dynamisme du laboratoire et à son rayonnement, et au-delà de l’Université.

Vous œuvrez à l’international pour vos missions de recherche, pouvez-vous nous en dire davantage sur ces missions ?

En complément de ce que j’ai évoqué pour les séminaires, la mobilité internationale est vitale pour que l’enseignant-chercheur demeure au fait des dernières avancées de son domaine. Personnellement, j’ai pu bénéficier d’une invitation récurrente au Courant Institute of Mathematical Sciences, New York University, depuis plusieurs années. Il s’agit d’un haut lieu des mathématiques et de ses applications ou l’on peut côtoyer les meilleurs spécialistes des diverses branches des mathématiques, notamment en ce qui concerne les systèmes dynamiques, les réseaux complexes et leurs applications en biologie et neuroscience. C’est un endroit exceptionnel pour développer ses recherches fructueuses. Cela constitue la motivation première. L’université de Columbia est aussi à quelques pas, et des connexions existent entre les deux institutions. C’est aussi une opportunité d’afficher directement la présence de notre laboratoire et de l’université Le Havre Normandie au niveau international. Au Havre, nous avons un excellent labo de Mathématiques avec de brillants chercheurs. Mais la concurrence est difficile à tous les niveaux pour bénéficier de fonds de recherche, et il est nécessaire d’avoir un rayonnement international pour que notre valeur soit connue et reconnue. Cet aspect international au niveau recherche se décline directement au niveau de l’enseignement en Master, au sein des Masters Internationaux MASC et IMFL qui bénéficient de cours en anglais et sont invités à participer au séminaires de recherche. Nous travaillons aussi à la possibilité de mise en place de projets COIL (Collaborative Online International Learning), qui donnent une dimension internationale aux enseignements tout en laissant la totale liberté aux institutions participantes pour ce qui concerne la gestion de leurs crédits universitaires. Tout cela participe à l’attractivité de nos formations à moyen et long termes dans un contexte où les institutions d’éducation supérieure redoublent d’efforts pour attirer étudiants nationaux et internationaux, notamment en France et aux États Unis.

Quels sont vos projets à venir ?

Le travail ne manque pas! Nous avons la chance de faire un métier passionnant. Au niveau recherche, les problématiques mathématiques issues des sciences du vivant, des neurosciences et de leurs modèles par systèmes dynamiques abondent et j’en ai pour quelques années. Nous nous sommes aussi intéressés depuis quelques années à la modélisation mathématique des émotions et de la dynamique de la psyché. Il s’agit d’une thématique qui va sans aucun doute se développer les années à venir et dans laquelle les systèmes dynamiques avec l’appui des dernières technologies et de l’intelligence artificielle auront leur mot à dire.